Voici le mémoire de Lucile, ancienne stagiaire de la session de Comportementaliste Canin de septembre 2020, qui s'est interrogée sur la transmission des émotions de l'humain au chien. La contagion émotionnelle est un sujet passionnant et surtout incontournable pour toute personne travaillant avec les animaux, il nous a donc semblé intéressant de partager son travail avec vous. Bonne lecture! :)
SOMMAIRE Introduction
I. Quelques notions sur le Chien et la relation Homme/Chien A.... Généralités B.... L’ocytocine et la relation Homme/Chien
II. Pourquoi peut-on parler d’empathie ? A.... Définition de l’empathie B.... La contagion émotionnelle chez le Chien C.... Canis empathicus
III. Exemples de comportements empathiques chez le Chien A.... Bâillement des humains B.... Pleurs des humains
C.... Humains en condition de stress et/ou de détresse
Conclusion
Bibliographie
Introduction
Le Chien, cet animal unique qui partage la vie de l’Homme depuis si longtemps.
Le Chien est, à ce jour, la plus ancienne espèce animale domestiquée par l’Homme. Du temps de nos ancêtres, il était principalement voué à des tâches bien précises et ne vivait quasiment jamais au sein des foyers. Au fil du temps, cette relation entre nos deux espèces a fondamentalement changé. Les chiens sont devenus des compagnons de vie pour les humains, faisant partie intégrante de nos foyers et partageant notre routine quotidienne (environnement et rythme). Ces changements ont alors permis d’accroître les liens affectifs existants entre le Chien et l’Homme. Au fil du temps passé à nos côtés, les chiens ont développé des capacités de lecture et de compréhension de nos comportements, leur permettant de s’adapter à nos modes de vie et à notre quotidien.
Toutefois, qu’en est-il des émotions ? Les chiens sont-ils également capables de ressentir les émotions des humains ? En d’autres termes, existe-t-il une transmission des émotions, aussi appelée contagion émotionnelle, entre nos deux espèces ?
Et si cela est le cas, serait-il alors justifié de parler de Canis empathicus ? À savoir, les chiens sont-ils capables d’éprouver de l’empathie envers les humains ?
L’objectif de ce mémoire est de faire un état des lieux des données existantes dans la littérature afin de déterminer si le terme Canis empathicus est un mythe ou une réalité. Pour cela, ce mémoire est divisé en trois parties. La première partie est constituée de quelques généralités sur le Chien et la relation existant entre l’Homme et le Chien. Dans la deuxième partie, j’explique pourquoi il est possible de parler d’empathie chez le Chien. Pour ce faire, le terme d’empathie est défini de manière générale, puis le phénomène de contagion émotionnelle des chiens par les humains est présenté, pour terminer par la notion de Canis empathicus. Enfin, dans la troisième partie, plusieurs exemples de comportements empathiques des chiens envers les humains sont présentés.
I. Quelques notions sur le Chien et la relation Homme/Chien
A. Généralités
Le Chien est un animal unique car c’est, à ce jour, le seul grand carnivore domestiqué par l’Homme.
Bien qu’il soit encore difficile de déterminer avec précision la date ainsi que les origines géographiques de l’apparition du Chien, les chercheurs s’entendent sur le fait qu’il existe un ancêtre commun entre le Chien (Canis Lupus Familiaris) et le Loup actuel (Canis Lupus Lupus) : le Loup gris (Canis Lupus). De plus, une étude réalisée en 2015 montre que les chiens cohabitent avec les humains depuis plus de 35 000 ans, faisant d’eux l’espèce animale la plus ancienne domestiquée par les Humains (Skoglund et al., 2015).
Plusieurs études montrent qu’au cours de ce processus de domestication, les chiens ont acquis des capacités de communication semblables à celles des humains (Hare et al., 2005), ainsi que des compétences cognitives et sociales (Hare et al., 2002 ; Miklosi et al., 2013). Au cours du processus de domestication, les chiens et les humains ont probablement développé une tolérance mutuelle via une modification des systèmes neuronaux impliqués dans les mécanismes d'affi
liation (Hare et al., 2005).
Ces adaptations réciproques leur permettent de cohabiter, communiquer, et créer des liens affectifs avec les humains, malgré les différences inter-espèces. Par exemple, il a été montré que les chiens :
· portent une attention particulière au regard des humains lorsqu’ils doivent effectuer une action (Call et al., 2003 ; Gácsi et al., 2004) ;
· sont capables de reconnaître les expressions faciales et la gestuelle des humains (Huber et al., 2013 ; Gacsi et al., 2004) ;
· regardent les humains lorsqu’ils ont besoin d’aide pour résoudre un problème (Miklosi et al., 2003) ;
· ou encore peuvent utiliser les indices de communication des humains, tels que le pointage et la direction du regard, pour trouver de la nourriture cachée (Udell et al., 2008 ; Hare et al., 2002 ; Hare et al., 1999 ; Miklosi et al., 2005).
De plus, il existe une corrélation positive entre la durée de l’attention qu’un chien porte à un humain, et le lien affectif qui les unit (Horn et al., 2013).
Du temps de nos ancêtres, les chiens domestiqués étaient principalement dédiés à une utilisation précise et formés dans ce but, par exemple pour chasser et rabattre le gibier, rassembler et surveiller les troupeaux, monter la garde, ou encore tirer des charges lourdes. La plupart du temps, les chiens vivaient en dehors de la maison, avec ou sans abri, et le plus souvent attachés. De nos jours, la relation entre l’Homme et le Chien a profondément changé. En effet, les chiens sont devenus des compagnons de vie pour les humains, leurs fonctions utilitaires ayant quasiment disparu au profit du statut d’animal de compagnie, et ce surtout dans les agglomérations. Il reste des exceptions comme les chiens de berger et les chiens d’assistance. La plupart des chiens vivent maintenant au sein des foyers, partageant tous les jours le même environnement et le même rythme de vie que leurs humains. Ces changements ont alors favorisé les liens affectifs existant entre les chiens et les humains.
B. L’ocytocine et la relation Homme/Chien
D’après de nombreuses études scientifiques, une des explications de cette relation affective privilégiée entre les chiens et les humains serait la production d’ocytocine, aussi appelée l’hormone de l’amour, un neuropeptide sécrété par l’hypothalamus (une partie du cerveau). Chez l’Homme, l’ocytocine est impliquée notamment dans la perception des émotions d’autrui ainsi que dans l’empathie (Guastella et al., 2010).
Chez les humains, il a été montré que le niveau d’ocytocine dans le sang augmente après une interaction sociale positive avec leurs chiens (caresses, jeux, paroles) (Handlin et al., 2011 ; Odendaal et al., 2003 ; Miller et al., 2009). En ce qui concerne les chiens, le niveau sanguin d’ocytocine augmente également après une interaction positive avec leurs humains (paroles, contacts visuels, caresses) (Handlin et al., 2011 ; Odendaal et al., 2003 ; Rehn et al., 2014 ; Hritcu et al., 2019 ; MacLean et al., 2017). Les chercheurs ont comparé les effets entre ces différentes interactions et ont découvert que les caresses sont le meilleur moyen de déclencher une augmentation de la production d'ocytocine dans le sang (Rehn et al., 2014). De plus, Handlin et al. ont montré que ces interactions entre les chiens et leurs humains entraînent également une diminution significative de la fréquence cardiaque des humains, ce qui pourrait être une conséquence de la libération d’ocytocine (Handlin et al., 2011). Cette baisse du rythme cardiaque suggère que les interactions avec les chiens pourraient avoir un léger effet anti-stress.
Quelques études, peu nombreuses cependant, ont également étudié le niveau d’ocytocine dans les urines et dans la salive et sont là aussi, concluantes. Mitsui et al. ont montré une augmentation de l’ocytocine dans les urines des chiens après une session de caresses avec une personne familière (Mitsui et al., 2011). D’autre part, le niveau d’ocytocine augmente dans les urines des chiens et de leurs humains après une interaction (regards mutuels, caresses, paroles), et cette augmentation est inhibée lorsque le contact visuel est bloqué (Nagasawa et al., 2009 ; Nagasawa et al., 2015). Ces résultats confirment donc l’existence d’un échange positif mutuel entre les chiens et leurs humains, entraînant une augmentation de l’ocytocine, ce qui va favoriser l’attachement social existant entre ces deux espèces. Pour ce qui est du niveau d’ocytocine dans la salive, une seule étude a été réalisée et montre une augmentation chez les chiens après une interaction sociale avec une personne familière (caresses, paroles, contact visuel) (MacLean et al., 2017).
En complément de toutes ces données, deux études ont également analysé l’impact d’une injection intranasale d’ocytocine chez les chiens sur leurs comportements sociaux envers leurs humains. Dans une étude se focalisant sur le contact visuel, des chiens sont mis en présence, après administration d’ocytocine, de leurs humains et de deux personnes inconnues (Nagasawa et al., 2015). Les humains ont alors interdiction de parler entre eux, ni de toucher volontairement les chiens, et ce afin de réduire au maximum l’influence d’autres stimuli que celui de l’injection d’ocytocine. L’administration d’ocytocine augmente la durée pendant laquelle les chiens regardent leurs humains. De plus, une autre étude a montré que l’injection d’ocytocine augmente la motivation des chiens à s’orienter vers et à s’approcher de leurs Humains (Romero et al., 2014).
À ce jour, seules deux études sont en contradiction avec l’ensemble de ces données, ne montrant pas d’augmentation du niveau d’ocytocine après une interaction entre les chiens et leurs humains (Powel et al., 2019 ; Marshall-Pescini et al., 2019).
Ainsi, la majorité des études confirment l’implication de l’ocytocine dans le lien particulier qui existe entre les chiens et les humains. Mais quelles en sont les conséquences ? Les chiens sont-ils également capables de ressentir les sentiments, les émotions des humains ? De ce fait, est-il possible que les chiens éprouvent de l’empathie envers les humains ? La suite de ce mémoire se consacre à répondre au mieux à ces questions.
II. Pourquoi peut-on parler d’empathie ?
A. Définition de l’empathie
Bien qu'il semble y avoir autant de définitions de ce terme que de chercheurs qui s'y intéressent, l'empathie a été largement décrite comme la capacité de reconnaître, d’être affecté par, et de partager l’état émotionnel d’un autre individu (de Waal et al., 2008 ; Decety and Jackson, 2004). La réponse empathique d’une personne est plus forte envers des individus avec lesquels un lien de familiarité existe (Cialdini et al., 1997).
L’empathie est une réponse émotionnelle permettant à un individu d’aligner ses sentiments sur les sentiments et les expériences d'un autre, l’amenant ainsi à prendre des mesures pour améliorer le bien-être de l’autre (Batson, 1998). La survie d’un groupe social est facilitée par le comportement d’empathie, qui améliore la capacité des individus à coopérer et à coordonner leur comportement par la perception des états émotionnels des uns et des autres (de Waal, 2008). Par conséquent, un indicateur d’empathie peut être un comportement de réconfort ou d'aide en réponse à la détresse d'un autre individu.
Preston et de Waal ont proposé un concept d'empathie à plusieurs niveaux, dont le niveau le plus fondamental est la contagion émotionnelle, définie comme une correspondance automatique et inconsciente entre l'état émotionnel de deux individus (Preston and de Waal, 2002 ; de Waal, 2008). L'empathie est donc fortement liée à une contagion émotionnelle dans laquelle la perception de l'état émotionnel d'un individu déclenche une réaction émotionnelle similaire chez un autre individu (« l’observateur ») (Batson et al., 1981).
La contagion émotionnelle est donc primordiale pour avoir des comportements d’empathie. Mais ce mécanisme existe-t-il chez le Chien ?
B. La contagion émotionnelle chez le Chien
La contagion émotionnelle a été définie comme un mécanisme automatique entraînant, chez un individu (« l’observateur »), un mimétisme et une synchronisation avec les expressions, vocalisations, postures, et mouvements d’un autre individu, et donc, par conséquent, le partage d’un même état émotionnel (Hatfield et al., 1993). « L’observateur » va percevoir les émotions et action d’un autre individu, et reproduire inconsciemment les mêmes actions (effet miroir) (Prochazkova and Kret, 2017). Il est important de noter que la force de la contagion émotionnelle est liée à la relation existant entre les deux individus. Plus le lien est fort, plus la contagion émotionnelle sera importante.
Chez les animaux vivant en groupe, ressentir les émotions des autres individus pourrait aider les membres du groupe à échapper aux prédateurs, à trouver des ressources alimentaires, et même à lutter contre des individus n’appartenant pas au groupe (Preston and de Waal, 2002). Ce mécanisme de contagion émotionnelle semble donc important pour le bon fonctionnement des groupes sociaux. Il a été montré qu’un grand nombre d’espèces animales vivant en groupe est capable de contagion émotionnelle, comme les primates (Parr, 2001 ; Ross et al., 2008 ; Palagi et al., 2009), les rongeurs (Langford et al., 2006 ; Bartal et al., 2011 et 2014), et les oiseaux (Edgar et al., 2011 ; Osvath and Sima, 2014 ; Watanabe and Ono, 1986). Dans ces études, seule la contagion émotionnelle entre individus de la même espèce a été étudiée.
La contagion émotionnelle entre individus n’appartenant pas à la même espèce existe-t-elle ? Nakahashi et Ohtsuki ont émis l’hypothèse que la contagion émotionnelle aurait évolué entre individus partageant le même environnement (Nakahashi and Ohtsuki, 2018). Or, le Chien et l’Homme partagent le même environnement depuis de très nombreuses années, permettant aux chiens de développer leur contagion émotionnelle innée et de la tourner vers les humains. Plusieurs études démontrent la présence de contagion émotionnelle chez les chiens, en montrant qu’ils sont capables de mimer les actions des humains, de se synchroniser avec eux, et de reconnaître leurs expressions faciales ainsi que leurs états émotionnels.
1) Mimer les actions des humains
Le mimétisme moteur implique souvent un contact visuel entre les individus qui interagissent. Comme il a été montré que les chiens portent une attention particulière au regard des humains lorsqu’ils doivent effectuer une action (Call et al., 2003 ; Gacsi et al., 2004), il est fort probable qu’ils soient capables de mimer les actions des humains.
Une étude a été menée afin de déterminer si un chien est capable d’imiter le comportement d’un démonstrateur humain afin d’effectuer une action correspondante en réponse (Topal et al., 2006). Dans un premier temps, un chien est entraîné à répéter neuf actions humaines simples après une demande (« Fait comme moi »). Une fois que le chien a réussi avec succès à reproduire les actions en question, des tests sont effectués avec des actions différentes réalisées par d’autres humains démonstrateurs. Le chien se montre capable de mimer ces nouvelles actions. Dans un deuxième temps, des séquences d’actions plus complexes sont montrées à ce même chien et une action de mimétisme est demandée par l’humain utilisant la même demande (« Fait comme moi »). Le chien a alors été capable de dupliquer toute la séquence d’actions, correspondant au déplacement d'un objet d'un endroit déterminé à un autre. Ces résultats montrent que le chien a pu reconnaître la séquence d'action montrée par l’humain, uniquement sur la base de l’observation, et la reproduire. Pourtant, des interrogations demeurent. Cette étude n’ayant été effectuée que sur un seul chien, les résultats peuvent-ils véritablement être généralisés ? Peut-on en conclure que tous les chiens sont capables de mimer ce type d’actions ? De plus, l’intervention verbale de l’humain démonstrateur en demandant au chien de reproduire son action peut avoir entraîné un biais dans les résultats. En effet, le chien aurait-il mimé l’action de l’humain sans la consigne verbale donnée ? Pour répondre à ces questions, d’autres études ont été réalisées.
Pongracz et al. ont étudié la capacité des chiens à contourner une clôture pour atteindre leur jouet préféré ou de la nourriture (Pongracz et al., 2001). Sans démonstration d’un humain, et même après six répétitions, les chiens ne réussissent pas à réaliser cette tâche de contournement. En revanche, une fois qu’un humain leur a montré comme faire, les chiens sont capables de contourner la clôture et d’atteindre le jouet/la nourriture. De plus, les chiens vont suivre cette solution déjà apprise même si un moyen plus simple, comme un raccourci à travers la clôture, leur est ouvert. Cela suggère que les chiens sont capables d’adopter le comportement de détournement montré par les humains pour atteindre leur but.
Kubinyi et al. ont également montré que les chiens sont influencés par le comportement de leurs humains, même lorsque l'objectif du comportement humain n’a pas de but précis (Kubinyi et al., 2003). Dans cette étude, les humains modifient leur façon habituelle de rentrer à leur domicile à la fin de leur promenade quotidienne, en faisant un petit détour. Les chiens développent alors progressivement une habitude similaire, et se dirigent vers ce détour avant même que leurs humains n'aient manifesté la moindre intention de marcher dans cette direction. De plus, les humains n'ont jamais ni récompensé, ni encouragé le comportement de détour des chiens.
2) Se synchroniser avec les humains
Deux études ont étudié la synchronisation comportementale entre chiens et humains lorsqu’ils marchent et sont arrivées à la même conclusion. La première montre que les chiens-guides d’aveugle, ainsi que les chiens de compagnie dont l’humain est aveugle, sont capables de marcher de manière synchrone avec leur humain (initiation du mouvement et direction), et ce, de manière spontanée (Naderi et al., 2001). Dans la deuxième étude, les chiens synchronisent leurs comportements à ceux de leurs humains voyants lorsque ces derniers se promènent silencieusement dans la rue (direction et vitesse) (Gaunet et al., 2014). Cependant, dans ces deux études, la majorité des chiens sont tenus en laisse par leurs humains, ce qui peut induire cette synchronisation. En effet, plutôt que de se synchroniser de manière inconsciente avec leurs humains, la plupart des chiens observés n'auraient en fait pas d'autre choix.
Duranton et al. ont donc étudié si les Chiens sont capables, lorsqu'ils sont autorisés à se déplacer librement dans un espace clos non familier, de synchroniser leurs positions (se déplacer dans la même partie de la pièce, rester à proximité de leurs humains), ainsi que leurs activités (marcher si l’humain marche, arrêter de marcher quand l’humain le fait, changer d'activité en même temps que l’humain) à ceux de leurs humains (Duranton et al., 2017). Cette étude montre une synchronisation des chiens avec leurs humains en termes de positions et d’activité, concluant à l'existence d'une synchronisation comportementale entre les chiens et les humains lorsque les deux partenaires se déplacent librement dans une pièce fermée. Attention, une interrogation se pose tout de même concernant les résultats de cette étude : les chiens se sont-ils synchronisés avec leurs humains à cause d’un stress ? Les auteurs présument que non car aucun comportement lié au stress n’a été observé chez les chiens. Cependant, même si le stress n’était pas visible extérieurement, il reste plausible que les chiens ont été dans un état de stress physiologique. Il serait donc judicieux d’ajouter l’analyse des paramètres de stress dans les futures études, comme le niveau de cortisol et/ou la mesure du rythme cardiaque.
D’autres études ont analysé la synchronisation du stress entre chiens et humains. Une analyse des fluctuations dans le rythme cardiaque des chiens lorsque leurs humains sont dans un état de stress a été réalisée (Katayama et al., 2019), en incluant la durée pendant laquelle les chiens et leurs humains ont vécu ensemble (facteur important pour évaluer l’importance de la contagion émotionnelle). Leurs résultats montrent une corrélation positive des fluctuations du rythme cardiaque entre les chiens et leurs humains, indiquant la présence d’une synchronisation. De plus, cette synchronisation est plus importante dans les dyades vivant ensemble depuis plus longtemps. Afin d’analyser la synchronisation du stress à long terme entre chiens et humains, Sundman et al. ont évalué la concentration de cortisol, une hormone du stress, dans les cheveux/poils de 58 dyades (Sundman et al., 2019). Leurs résultats montrent une forte corrélation de la concentration de cortisol entre les chiens et leurs humains, indiquant l’existence d’une synchronisation interspécifique à long terme du niveau de stress. Comme ils observent également que la personnalité des humains affecte le niveau de cortisol des chiens, et non pas l’inverse, ils en ont conclu que ce sont bien les chiens qui reflètent le niveau de stress de leurs humains, signe évident de contagion émotionnelle. Un point intéressant dans ces deux études est que la synchronisation observée est plus importante chez les chiens femelles que chez les mâles. L’ocytocine, la molécule impliquée dans la relation Homme-Chien, pourrait être une explication car son administration a montré un effet supérieur chez les femelles que chez les mâles (Nagasawa et al., 2015). Le sexe des chiens serait donc impliqué dans la synchronisation physiologique entre nos deux espèces.
3) Reconnaître les expressions faciales et l’état émotionnel des humains
De nombreuses études ont montré que les chiens sont capables de distinguer et d’interpréter différentes expressions faciales représentant différents états émotionnels.
Nagasawa et al. ont analysé si les chiens ont la capacité de faire la différence entre deux expressions faciales (visage souriant versus neutre) provenant de leurs humains ou de personnes non familières (Nagasawa et al., 2011). Pour cela, six chiens capables de reconnaître les photographies d’un humain non familier présentant un visage souriant versus la face arrière de la tête ont été sélectionnés. Plusieurs séries de photographies de leurs humains respectifs ou de personnes non familières, ayant soit un visage souriant, soit un visage neutre, ont alors été présentées à ces six chiens. Les chiens sont capables de reconnaître les photographies présentant un visage souriant que ce soit de leurs humains, ou de personnes inconnues. Cette étude montre donc que les chiens sont capables de différencier les visages souriants des visages neutres de leurs humains, et qu’ils peuvent ensuite transférer cela à des visages de personnes inconnues. Mais les chiens réagissent-ils vraiment à l'expression d'une émotion, ou répondent-ils à un autre indice ? En effet, les chiens peuvent avoir simplement utilisé un indice discriminatoire important, comme la visibilité des dents sur les visages souriants, mais pas sur les visages neutres, pour sélectionner ces photographies. De plus, il est également à noter que lors de leur sélection, les chiens ont été récompensés par de la nourriture uniquement lorsqu’ils choisissaient la photographie avec le visage souriant, ce qui a pu jouer un rôle sur la suite de l’étude.
Müller et al. ont, quant à eux, étudié si les chiens peuvent différencier les visages humains exprimant la joie ou la colère (Müller et al., 2015). À la différence de l’étude de Nagasawa décrite ci-dessus, les auteurs ont séparé les chiens en deux groupes lors de la phase d’entraînement (PE). Les chiens du premier groupe ont été récompensés lorsqu’ils reconnaissaient un visage exprimant la colère, alors que ceux du deuxième l’ont été lorsqu’ils reconnaissaient un visage exprimant la joie. Dans chaque groupe, les chiens n'ont vu que les moitiés supérieures ou inférieures des visages. Quatre types d’images ont ensuite été montrés aux chiens : la même moitié des visages que pendant la PE mais avec de nouvelles personnes, l'autre moitié des visages utilisés dans la PE, l'autre moitié des visages de nouvelles personnes, ou la moitié gauche des visages utilisés dans la PE. Avec cette approche, il est donc possible d’analyser la capacité des chiens à reconnaître spontanément de nouvelles images qui n’ont en commun avec les images présentées lors de la PE que l’expression émotionnelle. Les résultats montrent que les chiens sont capables de reconnaître la même émotion que dans la PE, quel que soit le type d’image présenté. Cette étude démontre que les chiens ne se basent pas uniquement sur un indice discriminatoire, comme il était possible de le penser dans l’étude présentée précédemment, mais qu’ils sont bien capables de reconnaître les expressions émotionnelles véhiculées dans les images de la PE, cela leur permettant de sélectionner par la suite les images présentant ces mêmes expressions. C’est donc une preuve solide que les chiens peuvent distinguer les expressions faciales représentant différents états émotionnels des humains.
Une autre étude porte sur la façon dont les chiens « scannent » les expressions faciales des humains en fonction de si elles sont menaçantes ou non (Somppi et al., 2016). Le regard du chien se focalise-t-il sur certains traits du visage en fonction du contenu émotionnel observé ? Pour y répondre, les chercheurs ont montré aux chiens des photographies d’humains inconnus ayant trois types d’expressions émotionnelles, à savoir menaçante (visage en colère), plaisante (visage souriant), et neutre. Ils ont ensuite analysé les mouvements des yeux des chiens regardant ces images. Les résultats montrent que le regard des chiens se répartit sur l’ensemble des traits du visage et interprètent un ensemble de traits formés par les yeux, la bouche, et le milieu du visage. Les chiens fixent en priorité les yeux, suggérant qu’ils constituent un trait très informatif pour eux, puis le milieu du visage et enfin la bouche. Ce résultat confirme l’hypothèse émise par Somppi et al. selon laquelle les yeux jouent un rôle important dans la perception du visage par les chiens (Somppi et al., 2014). De plus, l’étude de 2016 montre également que la distribution du regard des chiens est modifiée en fonction de l’expression présentée (Somppi et al., 2016). Les chiens ont tendance à détourner leur regard des visages humains menaçants dès les premières minutes. Compte tenu de la sensibilité des chiens aux signaux de menace (Vas et al., 2005 ; Gyori et al., 2010), ce détournement du regard vis-à-vis des visages humains menaçants pourrait être une manifestation de comportement apaisant. Cette étude prouve, là encore, que les chiens sont capables d’analyser
et d’interpréter les expressions émotionnelles provenant des humains.
Il existe plusieurs autres études montrant que les chiens reconnaissent les différentes émotions faciales des humains. Albuquerque et al. ont fait état d'une capacité chez les chiens à intégrer des indices émotionnels visuels et auditifs : les chiens peuvent faire correspondre correctement des visages humains heureux ou en colère avec une vocalisation exprimant la même « valence émotionnelle » (Albuquerque et al., 2016). Il a également été montré que les chiens sont capables de faire la distinction entre le visage heureux et le visage neutre de leurs humains (Turcsan et al., 2015). Pour finir, trois autres études décrivent que les chiens ont une capacité remarquable à distinguer et interpréter les états émotionnels humains (Deputte and Doll, 2011 ; Morisaki et al., 2009 ; Merola et al., 2014). Cependant, une unique étude ne montre pas d’effet des visages humains amicaux ou menaçants sur le regard porté par les chiens (Racca et al., 2012).
Récemment, Siniscalchi et ses collègues ont examiné si les chiens sont capables de reconnaître six émotions humaines (la joie, la tristesse, la surprise, le dégoût, la peur, et la colère), lorsque des sons correspondants à chacune de ces émotions sont diffusés dans un haut-parleur (Siniscalchi et al., 2018). Pour cela, ils ont analysé l’orientation de la tête et les manifestations de stress (comportement et activité cardiaque) des chiens, suite à la diffusion des différents sons. Des études montrent que l’orientation de la tête est une réponse non conditionnée dont la direction indique, de façon opposée, l'hémisphère cérébral impliqué dans le traitement du stimulus acoustique (orientation vers la gauche = hémisphère droit, et inversement) (Hauser et al., 1998 ; Scheumann and Zimmermann, 2008). L'hémisphère droit est utilisé pour le traitement des émotions négatives, alors que le gauche l’est pour le traitement des émotions positives (Rogers, 2010). Après la diffusion de sons correspondants à des émotions négatives (peur, tristesse, et colère), les chiens tournent la tête du côté gauche, indiquant l’implication de l’hémisphère droit dans le traitement des stimuli. À l’inverse, les chiens tournent la tête du côté droit, indiquant l’implication de l’hémisphère gauche, lorsqu’ils entendent des sons positifs (joie). Ces résultats montrent que les chiens sont capables de distinguer si les sons humains proviennent d’une émotion négative ou positive. En ce qui concerne la surprise et le dégoût, aucun effet n’est observé, suggérant que ces sons n’ont pas de « valence émotionnelle » particulière pour les chiens. De plus, les chiens entendant des sons négatifs (peur, tristesse, et colère) montrent plus de manifestations de stress que ceux entendant des sons positifs (joie). Les chiens sont donc bien capables de distinguer les émotions humaines.
C. Canis empathicus
Plusieurs éléments laissent à penser que les chiens sont capables d’empathie, définie dans ce mémoire par le terme Canis empathicus.
Tout d’abord, il est bien connu que la contagion émotionnelle est un élément de base de l'empathie permettant aux individus de ressentir les émotions des autres (de Wall and Preston, 2017 ; Preston and de Wall, 2002), sans toutefois nécessiter l’utilisation de fonctions psychologiques complexes (de Waal, 2009). Les chiens étant capables d’éprouver une contagion émotionnelle vis-à-vis des humains, il est fort probable qu’ils puissent ressentir de l’empathie envers les humains.
Ensuite, Silva et de Sousa ont mis en évidence trois arguments principaux permettant de penser que le Chien est capable d’empathie envers l’Homme (Silva and de Sousa, 2011) :
· les chiens descendent des loups qui sont des animaux très sociaux, s'engageant dans des activités coopératives et ayant probablement une certaine capacité d'empathie envers leurs congénères socialement proches ;
· les changements biologiques qui se sont produits au cours du processus de domestication ont peut-être permis aux chiens d'augmenter leurs capacités empathiques innées, afin de se synchroniser avec les humains et prédire leurs comportements avec plus de souplesse que leurs ancêtres ;
· la diversification et la sélection des races canines pour des capacités cognitives de plus en plus complexes peuvent avoir conduit à des formes d'empathie de plus en plus avancées chez les chiens, qui ressemblent maintenant à certains traits de la communication émotionnelle humaine.
De plus, les humains ayant des chiens de compagnie mettent souvent en avant le fait que leurs chiens perçoivent et portent une attention à leurs émotions, en ressentant par exemple leurs joies et/ou leurs tristesses, suggérant l’empathie (Vitulli, 2006).
Pour finir, il est bien connu que l'augmentation de l'ocytocine facilite la lecture des émotions des autres et l'émergence de réponses empathiques (Guastella et al., 2010). Or, il a été montré que les chiens, suite à une interaction positive avec les humains, sécrètent de l’ocytocine, impliquée dans le lien particulier qui existe entre les chiens et les humains. Il est donc fort probable que la sécrétion d’ocytocine par les chiens leur permette également d’éprouver de l’empathie envers les humains.
Attention toutefois avec ce terme Canis empathicus, car il est très important d'utiliser une définition de l'empathie qui ait un sens dans le contexte du répertoire comportemental normal d'un chien de compagnie. Basée sur les données présentées dans les parties précédentes, il semble raisonnable de définir Canis empathicus comme une contagion émotionnelle ressentie par les chiens, entraînant une synchronisation physiologique entre nos deux espèces ainsi qu’une modification du comportement des chiens en réponse aux émotions véhiculées par les humains.
III. Exemples de comportements empathiques chez le Chien
La présence de comportements empathiques des chiens envers les humains peut être observée dans différentes situations : lorsqu’un humain bâille, lorsqu’un humain pleure, ou lorsqu’un humain est en condition de stress et/ou de détresse.
A. Bâillement des humains
Bien que la reproduction du bâillement humain par un chien peut être considérée comme un comportement de mimétisme plutôt que de l’empathie, il semble parfaitement justifié de développer ce sujet dans cette partie. En effet, plusieurs études ont montré qu’il existait un lien chez les humains entre le bâillement « contagieux » et la capacité d'empathie (Preston and de Wall, 2002 ; Senju et al., 2007 ; Platek et al., 2003). De ce fait, l’existence de ce lien entre reproduction du bâillement et comportement empathique est donc largement plausible chez les chiens.
De nombreuses études indiquent que les bâillements « contagieux » existent chez les chiens. Cependant, les conclusions quant au lien avec une manifestation d’empathie par les chiens sont assez contradictoires.
Joly-Mascheroni et al. ont analysé le comportement de chiens de compagnie face à un humain non familier qui bâille (observation en direct, présence donc d’indices visuels, auditifs, et olfactifs) et ont montré que la majorité des chiens bâillent après avoir observé l’humain en train de bâiller (Joly-Mascheroni et al., 2008). Romero et ses collègues ont, quant à eux, étudié le comportement de chiens de compagnie lorsqu’ils observent leur humain ou une personne non familière en train de bâiller ou faisant simplement des mouvements de bouche (Romero et al., 2013). Là aussi, l’observation se fait en direct, permettant la présence d’indices visuels, auditifs, et olfactifs. Leurs résultats montrent que les chiens bâillent plus fréquemment lorsque les humains le font aussi, que lorsqu’ils font de simples mouvements de bouche. De plus, les chiens reproduisent plus souvent le bâillement lorsque l’humain en face d’eux est familier. Afin d’être fixés sur les causes possibles de la « contagion » du bâillement chez les chiens (empathie versus anxiété), les auteurs ont regardé la fréquence et le rythme cardiaque des chiens au cours de leur expérience. Ni la fréquence ni le rythme cardiaque ne sont modifiés, indiquant que cette « contagion » du bâillement n’est pas liée à des facteurs de stress chez les chiens. En complément, Silva et al. ont montré un mécanisme de bâillement « contagieux » chez les chiens de compagnie, mais en utilisant uniquement des indices auditifs (Silva et al., 2012). Les chiens bâillent plus souvent lorsque le stimulus auditif provient de leurs humains plutôt que de personnes non familières. Dans les deux dernières études citées, les auteurs ont conclu que ce phénomène de bâillement « contagieux » est bien un comportement empathique du Chien envers l’Homme car, d’une part, il n’est pas lié à des facteurs de stress et, d’autre part, ce comportement est plus important lorsque les chiens sont face à leurs humains.
À l’inverse, deux études montrent que les chiens de compagnie sont capables de reproduire le bâillement des humains après une observation en direct, donc avec la présence d’indices visuels, auditifs, et olfactifs, mais qu’il n’y a pas de différence en fonction de la personne en face du chien (leur humain versus une personne non familière) (Madsen and Persson, 2013 ; Neilands et al., 2020). Les auteurs en ont donc conclu que ce phénomène de bâillement « contagieux » existe bien chez les chiens, mais que ce n’est pas spécifiquement un comportement empathique des chiens envers les humains.
De plus, deux autres études ne montrent pas la présence de bâillement « contagieux » chez les chiens, mais les méthodologies utilisées peuvent être remises en question. Dans la première, seul un chien de compagnie, sur les quinze testés, reproduit le bâillement de l’humain, mais les chiens ne sont, ici, mis qu’en présence d’indices visuels (Harr et al., 2009). Ceci indiquerait que les chiens auraient donc besoin d’avoir des indices auditifs et olfactifs en plus des indices visuels pour reproduire le bâillement des humains. Dans la deuxième, seulement 20 % des chiens montrent un bâillement « contagieux » après une observation en direct d’un humain, mais, à l’inverse de toutes les autres études, tous les chiens étudiés ici sont des chiens vivant en chenil (Buttner and Strasser, 2014). Le fait que les chiens vivent en chenil et non dans un foyer peut avoir un impact sur leur lien vis-à-vis de l’Homme, et donc sur leur possibilité de ressentir les émotions des humains, étape indispensable pour l’empathie.
B. Pleurs des humains
Comment les chiens réagissent-ils lorsqu’un humain se met soudainement à pleurer ? Le comportement des chiens dans de telles circonstances est compliqué à interpréter. En effet, les chiens peuvent réagir de plusieurs manières soit parce qu’ils expriment une contagion émotionnelle et de l’empathie, soit parce qu’ils expriment simplement de la curiosité ou une recherche de réconfort. Par conséquent, le principal défi sera de concevoir une méthodologie expérimentale qui permette de faire la distinction entre curiosité, recherche de réconfort, et véritable préoccupation empathique.
Dans ce sens, Custance et Mayer ont analysé le comportement de chiens face à leurs humains ou une personne inconnue pleurant, fredonnant, ou parlant (Custance and Mayer, 2012). Les chiens s'orientent davantage (regard, approche, contact) vers les humains qui pleurent, que vers ceux qui fredonnent ou qui parlent, soutenant l'affirmation selon laquelle ils répondent avec empathie à la détresse humaine, et non qu’ils agissent par curiosité lorsqu’un humain produit un son (car, dans ce cas, ils auraient aussi approché l’humain fredonnant ou parlant). De plus, les chiens s'approchent systématiquement de la personne qui pleure, même s'il s'agit d'un inconnu, ce qui suggère que leurs approches sont motivées par l'empathie et non par un désir de réduire leur détresse personnelle (car, dans ce cas, ils seraient allés chercher du réconfort auprès de leurs humains). Attention toutefois avec cette interprétation. En effet, un chien de compagnie qui s'approche d'un membre de sa famille en détresse est susceptible d'être positivement renforcé en recevant de l'affection.
Yong et Ruffman ont, quant à eux, analysé le comportement de chiens lorsqu’ils entendent, au travers d’un haut-parleur, des nourrissons pleurer ou balbutier, ou simplement un bruit de fond (Yong and Ruffman, 2014). En plus de la réponse purement comportementale (signe de vigilance et/ou d’inconfort), le niveau de cortisol a été mesuré. Seuls les pleurs des nourrissons provoquent une augmentation du niveau de cortisol ainsi qu'une combinaison unique de comportements impliquant vigilance et inconfort. Une augmentation de l’attention et du niveau de cortisol étant interprétée chez l’Homme comme une manifestation de contagion émotionnelle (une composante de l'empathie) (Giardino et al., 2008), il est possible de suggérer que les pleurs des nourrissons ont suscité une forme d’empathie chez les chiens. Comme pour l’étude de Custance et Mayer, là aussi, l’impact d’un possible renforcement positif face à ce genre de stimulus n’est pas à exclure. Cependant, Yong et Ruffman ont montré que les pleurs des nourrissons induisent la même réaction chez les chiens n’ayant pas d’expérience avec les enfants, suggérant que la réponse des chiens est bien liée à des comportements empathiques.
Dans une étude publiée en 2017, Huber et al. ont analysé l’empathie des chiens en comparant leurs réponses comportementales face à des émotions négatives (pleurs) et positives (rires), les sons ayant été diffusés par haut-parleur (Huber et al., 2017). Les chiens soumis aux pleurs présentent des réactions émotionnelles négatives (augmentation des signes comportementaux de détresse) comparé aux chiens entendant des rires, et ce malgré des degrés d'attention équivalents. Les auteurs ont donc conclu à une contagion émotionnelle des chiens par les pleurs, induisant une probable réaction empathique.
Afin de savoir si l'empathie des chiens peut entraîner des comportements d'aide envers leurs humains lorsque ceux-ci sont enfermés et se mettent à pleurer, Sanford et al. ont séparé les chiens de leurs humains par une porte et ont demandé aux Humains soit de pleurer, soit de fredonner (Sanford et al. 2018). Les auteurs ont alors étudié la motivation du chien à libérer leurs humains (ouvrir la porte). Leur hypothèse est la suivante : si l’ouverture de la porte par le chien est motivée par l'empathie, le comportement se manifestera plus vite si l’humain derrière la porte pleure. Leurs résultats montrent que les chiens ouvrent plus rapidement la porte pour libérer leurs humains lorsque ces derniers pleurent, que lorsqu’ils fredonnent. Ils en concluent que ce sont les pleurs qui ont motivé les chiens à libérer leurs humains, et donc que les chiens ont fait preuve d’empathie.
C. Humains en condition de stress et/ou de détresse
Dans une étude réalisée en 2014, des chercheurs se sont intéressés à la contagion émotionnelle entre le Chien et l’Homme dans le contexte d’un stress induit expérimentalement chez les humains, et si ce changement d’état affectif a un effet sur le comportement des chiens (performances à réaliser un test de mémoire) (Sümegi et al., 2014). Leurs résultats montrent que lorsque les humains sont dans un état de stress, leur performance de mémoire est augmentée. Lorsque les chiens sont en présence de leurs humains stressés, ils montrent également une amélioration significative de leurs performances dans le test de mémoire. C’est donc l’état de stress des humains qui a influencé le comportement des chiens, probablement via une contagion émotionnelle. La présence de cette contagion émotionnelle appuie l’hypothèse que les chiens sont capables de ressentir de l’empathie envers les humains.
Van Bourg et al. ont, quant à eux, étudié la capacité des chiens à libérer leurs humains présentant des signes de stress (Van Bourg et al., 2020). Pour cela, ils ont placé les humains dans une boîte fermée et ils leur ont demandé soit d’appeler à l’aide, soit de lire calmement à haute voix. Afin de libérer leurs humains, les chiens devaient simplement déplacer un morceau de carton mousse servant à fermer la boîte. Afin de s’assurer que les chiens sont bien capables d’ouvrir cette boîte, les auteurs ont, dans un premier temps, placé de la nourriture très appétante à l’intérieur et ont regardé si les chiens arrivent à retirer le carton mousse (phase d’entraînement). Parmi les chiens capables d’ouvrir la boîte dans cette phase d’entraînement, les résultats de cette étude montrent que ces chiens libèrent leurs humains plus souvent lorsque ceux-ci appellent à l'aide que lorsqu'ils lisent calmement. De plus, les chiens manifestent plus de comportements de stress (aboiement, gémissement) lorsque leurs humains appellent à l’aide que lorsqu’ils lisent, indiquant une contagion émotionnelle des chiens par leurs humains. Cette preuve de contagion émotionnelle soutient donc l'hypothèse selon laquelle la libération d’un humain en état de stress est bien un comportement motivé par l'empathie. Dans une autre étude relativement similaire, Carballo et al. ont également montré que les chiens libèrent leurs humains plus fréquemment lorsqu’ils font semblant d'être stressés que lorsqu'ils sont calmes (Carballo et al., 2020).
Pour finir, une seule étude a été réalisée pour tester si les chiens sont capables de comprendre et de chercher de l’aide lorsque leurs humains sont dans une situation d’urgence (Macpherson and Roberts, 2006). Pour cela, soit les humains simulent une crise cardiaque, soit ils feignent un accident au cours duquel une bibliothèque leur tombe dessus. Dans les deux cas de figure, les chiens ne semblent pas comprendre l’urgence de la situation ni la nécessité d’aller chercher de l’aide, mais ils semblent quand même plus attentifs à leurs humains, ce qui peut indiquer une possible inquiétude. Cependant, cela n'écarte pas l’hypothèse que les chiens montrent de l’empathie envers les humains, car, dans cette étude, les scénarios d'urgence ne sont peut-être pas suffisamment dramatiques ou réalistes pour être interprétés par les chiens comme une véritable urgence. De plus, les situations d’urgence étant fictives, elles ne permettent pas la libération par les humains d’indices olfactifs de stress ou de douleur, normalement produits dans un vrai cas d’urgence, indices importants pour que les chiens puissent évaluer avec précision les émotions des humains et y répondre.
Conclusion
L’objectif de ce mémoire est de répondre à la question suivante : est-ce que le terme Canis empathicus, définissant l’empathie du Chien envers l’Homme, est un mythe ou une réalité ?
L'empathie est définie comme la capacité de reconnaître, d’être affecté par, et de partager l’état émotionnel d’un autre individu. La transmission des émotions, aussi appelée contagion émotionnelle, est donc primordiale pour avoir des comportements d’empathie. Afin de pouvoir confirmer ou infirmer si les chiens sont capables de ressentir de l’empathie envers les humains, il faut dans un premier temps déterminer si ce mécanisme de contagion émotionnelle existe bien chez les chiens.
La contagion émotionnelle est définie comme un mécanisme automatique entraînant chez un individu un mimétisme et une synchronisation avec un autre individu, permettant par conséquent de partager le même état émotionnel. Plus la relation est forte entre les deux individus, plus la contagion émotionnelle est présente. De plus, la contagion émotionnelle évolue entre individus partageant le même environnement. Or, le Chien et l’Homme partagent le même environnement depuis de très nombreuses années, ce qui a sans doute permis aux chiens de développer leur contagion émotionnelle innée, et de la tourner vers les humains. Dans ce sens, plusieurs études valident la présence de contagion émotionnelle chez les chiens, en montrant qu’ils sont capables de mimer les actions des humains, de se synchroniser avec eux, et de reconnaître leurs expressions faciales ainsi que leurs états émotionnels. Les chiens étant capables d’éprouver une contagion émotionnelle vis-à-vis des humains, il est fort probable qu’ils puissent également ressentir de l’empathie.
En complément, l'ocytocine pourrait également être impliquée car cette hormone facilite la lecture des émotions des autres et l'émergence de réponses empathiques. Comme de nombreuses études montrent que les chiens secrètent de l’ocytocine suite à une interaction positive avec les humains, et que cette ocytocine est impliquée dans le lien particulier qui existe entre nos deux espèces, il est fort probable que la sécrétion d’ocytocine par les chiens leur permette également d’éprouver de l’empathie envers les humains.
Sur la base des données étudiées à travers ce mémoire, il est important de bien définir le terme Canis empathicus. Selon moi, il peut être défini par une contagion émotionnelle ressentie par les chiens, déclenchant une synchronisation physiologique entre nos deux espèces et induisant une modification comportementale des chiens en réponses aux émotions transmises par les humains.
Afin de valider l’existence de cette empathie chez les chiens, de nombreuses études ont été réalisées et sont décrites dans ce mémoire. Les résultats montrent que les chiens sont capables de comprendre et d’analyser les états émotionnels des humains (pleurs, stress, détresse), de se synchroniser avec ces émotions, et de modifier leurs comportements en conséquence. Il est également démontré que les chiens reproduisent le bâillement des humains et cela peut être considéré comme un comportement d’empathie, car il existe un lien entre bâillement « contagieux » et capacité d'empathie.
Mais quelques questionnements demeurent, cependant, quant à la véritable motivation des chiens face aux sentiments de leurs humains. Quand les chiens réagissent aux émotions des humains, est-ce une véritable contagion émotionnelle ou simplement une réaction face à des vocalises émotionnelles et/ou des situations qui les « perturbent » ? Dans les études portant sur la modification du comportement des chiens lorsque leurs humains montrent des signes de stress, les chiens s’approchent-ils de leurs humains parce qu’ils ressentent de l’empathie envers eux ? Ou simplement parce qu’ils éprouvent de la curiosité ou un besoin de se rassurer, de se réconforter ? Les auteurs ont, pour la plupart, ajouté des conditions expérimentales dans leurs études afin de répondre à ces questions, et ils ont montré que les réactions des chiens étaient principalement liées à une capacité d’empathie, et non pas à une simple curiosité ou un besoin de réconfort. Cependant, quelques rares études ont des résultats contradictoires, ne montrant pas de lien entre la réaction des chiens et le mécanisme d’empathie.
Pour ce qui est des comportements des chiens face à leurs humains dans une situation d’urgence, il n’y a qu’une seule étude publiée à ce jour, et cette dernière montre que les chiens ne sont pas capables de comprendre l’urgence de la situation ni la nécessité d’aller chercher de l’aide. Cependant, il est important de noter que dans cette étude, les situations d’urgence sont fictives, ce qui peut avoir un impact important sur le comportement des chiens. En effet, de nombreux témoignages d’humains en situation réelle d’urgence rapportent que leurs chiens ont été capables d’analyser la situation, de comprendre le caractère urgent de celle-ci, et d’aller chercher de l’aide.
Même s’il reste encore des études à réaliser, notamment avec un schéma expérimental suffisamment élaboré pour répondre avec précision aux différentes interrogations mentionnées ci-dessus, les études publiées à ce jour montrent bien l’existence d’une contagion émotionnelle entre les chiens et les humains, pouvant expliquer la capacité du Chien à ressentir de l’empathie envers l’Homme.
En conclusion, et d’après les données présentées dans ce mémoire, je pense qu’il est justifié de valider la capacité du Chien à ressentir de l’empathie envers l’Homme, et donc de dire que le terme Canis empathicus est une réalité.
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